23 mai 2008

Sources, politiques et perspectives du syndicalisme français

Par Guy Neyron (Cahiers Des RH 2008)



Introduction

Pour comprendre le comportement d’un interlocuteur, il est nécessaire de connaître sa
culture : une femme habillée en blanc peut être, suivant sa culture d'origine, en habit de
mariée ou en deuil.

Évaluer les demandes ou les positions des représentants du personnel, nécessite de les
situer dans le cadre de la politique affichée par leur syndicat.

Il est donc nécessaire d'examiner la philosophie, l'idéologie et l'histoire des syndicats
pour bien saisir la valeur des positions de ces interlocuteurs et construire un dialogue
social efficace avec eux, qui tienne compte de ces réalités.
Connaître l'origine des idées et des postures des syndicats de salariés permet de
relativiser leurs attitudes : ce qui peut apparaître « décalé » dans leurs idées, l'est
seulement entre les réalités qui ont été fondatrices de ces mouvements et celles
d'aujourd'hui, évidemment complètement différentes.

Deux phénomènes ont en effet complètement changé la vision que nous avons des
réalités sociales depuis un siècle :
-- l'élévation du niveau de vie nous rend presque étrangers au vécu de la misère et de la
famine qui ont été les principaux facteurs des luttes sociales d'hier.
-- Le système politique démocratique d'une part et le pouvoir syndical d'autre part ont
complètement transformé les relations dues à une absence totale de dialogue social et
de répartition du pouvoir.

Néanmoins, l'analyse des fondements du syndicalisme apporte plus que des atouts
pour les comprendre : des lignes directrices pour anticiper leur évolution et adapter les
stratégies des entreprises et les syndicats aux relations sociales futures.




A) philosophie des idées du syndicalisme.

Le premier grand mouvement "social" provient de la religion chrétienne et de sa
composante "humaniste" Depuis Charlemagne - et pendant 10 siècles- la prévoyance
sociale a été réalisée par l'église catholique : orphelinat, hôpitaux, soupes populaires,
hospices, etc.

Le second grand mouvement social d’où sont originaires les syndicats, sont les
révolutions populaires du XVIII et XIXe siècles - dont l'origine fut principalement la faim
et la misère - qui ont validé les thèses philosophiques de Hegel et ont trouvé leur
consécration dans l'analyse sociologique de Karl Marx qui conclut à la nécessaire
destruction de l'ordre social capitaliste par la révolution violente des institutions
démocratiques bourgeoises.
Par la suite, Staline et Trotsky ont défini des modes opératoires qui marquent toujours
les approches des Syndicats actuels.

Entre les deux, les mouvements réformistes chrétiens et socialistes ont, eux aussi,
conçu des approches du progrès social qui ont largement inspiré les pratiques du droit
du travail français actuel.



1) la doctrine sociale chrétienne.

Le fondement de l'idéologie chrétienne est idéaliste : le bonheur des hommes ne peut
se réaliser dans les biens matériels, mais dans les biens spirituels : foi, espérance,
charité.

L'application de ces vertus a engendré différents mouvements de transformation de la
société :

- le mouvement séculier et institutionnel :
Pour mettre en place le développement et la réalisation des vertus religieuses sur terre,
il est nécessaire de le réaliser par le pouvoir -ou par la force.
C'est ainsi fut réalisée -depuis Charlemagne- l'alliance de l'église et du pouvoir, et que
se sont développés - au Moyen Âge - des croisades et des ordres religieux guerriers.

Une autre application de cette réalisation matérielle de la destinée divine sur terre est la
nécessité pour les chrétiens de faire fructifier les "talents" qui leur ont été donnés pour
gagner leur salut (image du poids des réalisations de leur vie dans la balance du
jugement dernier).
Le sociologue Weber a démontré que c'est ainsi que s'est développé l'esprit
d’entreprise et le capitalisme à partir des communautés réformées calvinistes (Suisse
et États-Unis).
Il apparaît donc, que d’une certaine manière, le capitalisme et une partie du mouvement
social et syndical ont la même origine idéologique.

- le mouvement caritatif
Suivant l'enseignement du Christ " heureux les pauvres, malheur aux riches". Les
ordres mendiants, et les communautés religieuses ont toujours pratiqué les soins et
l'hospitalité aux plus démunis.
Un exemple récent en est l'abbé Pierre, qui était en même temps un moine capucin
(ordre mendiants des franciscains) et un militant particulièrement proche des
mouvements (DAL) et des méthodes trotskistes.

- le mouvement humaniste :
Fondamentalement, pour les chrétiens, chaque homme a une valeur intrinsèque et
égale puisqu’il possède en lui une parcelle de divin (chacun est fait "à l'image de Dieu»)
et a la même destinée (gagner son salut spirituel).

Deux conséquences :
* la fraternité humaine conduit à éviter l'hostilité vis-à-vis de son prochain (fût-il le
patron). Au contraire, comme tous les hommes font en partie de la même
communauté, chacun s'attachera à en comprendre les différents partis et à dialoguer
avec eux (suivant le principe : "tu aimeras ton ennemi").


* la déchéance humaine ne saurait donc correspondre ni au respect des "enfants de
Dieu", ni aux conditions matérielles de réalisation de leur salut sur terre (ce qui rejoint le
mouvement séculier).

C'est ainsi que s'est développé le syndicalisme chrétien à partir du XIXe siècle.
Celui-ci n'a jamais été subordonné au pouvoir religieux ou politique. Indépendance qui
lui a valu sa représentativité actuelle.



2) La dialectique du maître de l'esclave et le Marxisme.

Le philosophe Hegel a mis en évidence le mouvement dialectique comme fondement de
la réalité humaine, et notamment la dialectique du maître de l'esclave comme principe
déterminant de l’ l'Histoire.

Trois conséquences importantes :

- la dialectique comme méthode d'analyse et de création des réalités humaines : c'est
un mouvement "en boucle" qui va de la réalité ("thèse") vers le progrès ("synthèse"), en
passant par un état de négation (antithèse) de la réalité; enfin la "négation de la
négation» conduit à la découverte de nouvelles perspectives permettant le progrès.

- l’Histoire s'écrit par une succession d'états où les esclaves prennent la place du
maître, etc.

- le vecteur constitutif de cette transformation est le travail (de l’esclave !).

Le sociologue Karl Marx reprend ces thèses en démontrant :

- le déterminisme matérialiste des sociétés : c'est le système de production qui
détermine l'organisation sociale ("le moulin à bras fait le Sultan, le moulin à vapeur fait la
société capitaliste ").

- la rupture entre le capital et le travail est la source du conflit des classes sociales et de
l'aliénation de la classe ouvrière qui ne peut dépasser cette situation que par la
révolution violente.

Les révolutions qui se multiplient dans toute l'Europe au XIXe siècle tendent à lui donner
raison et ses théories deviennent la doctrine explicative d'une réalité atroce et le moyen
d'en sortir ("prolétaires de tous les pays unissez-vous").

Les thèses de Marx ont été reprises et mises en application différemment par des
responsables politiques avec deux approches- révolutionnaire et réformiste-
complètement opposées sur les moyens.



1) approches révolutionnaires :
Celles-ci se caractérisent par la volonté de renverser le pouvoir capitaliste en place pour
y installer le pouvoir de la classe ouvrière :


- Staline réalise la mise en oeuvre de la "dictature du prolétariat" au moyen du pouvoir
d'un État totalitaire (sur lequel il a tout pouvoir).

Pendant soixante-dix ans l'union soviétique, qui affichait des résultats spectaculaires
(première puissance spatiale et nucléaire mondiale quinze ans après la destruction
totale du pays) et qui avait su cacher les horreurs de la coercition et de la répression
interne (10 millions de morts) - a été le modèle (et le financeur) des partis
communistes et des syndicats révolutionnaires européens.

Elle leur a légué également ses modèles culturels :

- totalitarisme idéologique : peu de place au débat interne, d’où les scissions
- centralisme démocratique : peu de partage du pouvoir
- primauté du fonctionnariat
- nationalisations,
- subordination du syndicalisme au pouvoir politique.

- Trotsky, au contraire, était farouchement hostile au capitalisme d'État et à la
bureaucratie qu’il engendrait.

Il était partisan de l'installation d'une démocratie bourgeoise et d'une situation qui aurait
pu ressembler à la société bourgeoise du XIXe siècle qui lui semblait favorable à la
prise de conscience populaire et à des progrès sociaux beaucoup plus rapides en
Russie et dans toute l'Europe.

Il a développé, face à ce type de situation, un certain nombre d'orientations tactiques
pour la lutte révolutionnaire :

- entrisme : les militants révolutionnaires doivent se joindre à d'autres partenaires
actifs sur des luttes qui peuvent faire avancer la cause révolutionnaire ;
- démocratie à la base : mise en place de conseil d'une usine démocratiques,
référendum, émergence des propositions de la base ;
- décentralisation des pouvoirs
- internationalisme : aucun progrès ne pouvant être réalisé en autarcie (derrière un "
rideau de fer") ;
- indépendance du pouvoir des travailleurs sur la production et du pouvoir politique.

Ces orientations n’ont jamais été mises en pratique en Russie, mais elles servent de
modèle aux partis politiques (LCR, LO,) et aux syndicats (SUD) ou tendances
syndicales (tendances FO & CGT) qui s'en réclament.

2)- approche réformiste

À partir de la même analyse marxiste, les socialistes réformistes se caractérisent par la
volonté de réaliser le changement par la lutte revendicative, et par la voie
démocratique et législative sans recourir à la révolution violente.

Ce courant a été incarné par Jean Jaurès qui proclamait en 1905 : "l’histoire de tous les
progrès de la classe ouvrière peut se résumer à convertir en formule légale les
conquêtes spontanément réalisées par les classes ouvrières".
Ce qui est exactement la méthode actuelle de la politique contractuelle préalable à
l'évolution législative.

Face aux ouvertures réalisées par les gouvernements depuis un siècle, cette tendance
s'est considérablement développée, (partis « démocrates-chrétiens » et « socio
démocrates ») et a n'a pas cessé de faire débat à l'intérieur des syndicats d’origine
marxistes.

3) approche sociologique : théorie du changement social

Depuis Marx, les sociologues ont étudié la genèse du changement social et des
révolutions.

Si la thèse du déterminisme matérialiste de Marx n'a jamais été est infirmée, ils ont fait
apparaître d'autres facteurs (culturel, démographique, technique), et agents
(« élites » et groupes de pression) déterminants des conflits sociaux.

Ainsi le sociologue Dahrendorf a mis en évidence que la répartition de l'autorité était au
moins aussi déterminante, puisque l'autorité est binaire et ne se partage pas du tout.
Ce qui conduit à regarder les conflits comme des moteurs permanents du changement
que les sociétés doivent « réguler » pour progresser.

En application, il a mis en évidence des moyens de prévention et de régulation :

- L'intensité des conflits décroît :
*dans la mesure où les groupes d'intérêt peuvent s'organiser ;
* dans la mesure où leurs conflits internes demeurent dissociés les uns des
autres ;
* dans la mesure où la distribution de l'autorité ne coïncide pas avec la
distribution des richesses;
* dans la mesure où la structure des classes sociales est assez ouverte pour
permettre une certaine mobilité ascendante et descendante.

- La violence des conflits décroît dans la mesure où les conflits sont « régulés».
Cela suppose que les parties reconnaissent ce qui les sépare, acceptent de part
et d'autre le sérieux de l'autre partie et s'en tiennent à des règles communes dans
leurs rapports mutuels.

Voilà tout un programme pour le dialogue social !




B) approche historique

De la même manière que la philosophie permet de comprendre l’idéologie, l’histoire
permet de comprendre la culture du monde du travail et des syndicats.

L'organisation du travail et des syndicats a été radicalement modifiée au cours des trois
derniers siècles : pendant l'ancien régime, sous le bonapartisme, et depuis le
mouvement républicain.

1) Le corporatisme de l'ancien régime.

Avec la création des cités franches se sont mis en place les corporations d'artisans et
de commerçants qui en étaient les fondateurs.
Dans chaque ville, l'exercice d'une profession était subordonné à l'appartenance à la
corporation qui organisait la formation et l'exercice de la profession ; notamment son
monopole de fabrication et de vente.
La corporation comportait par ailleurs, sous l'égide d'un "saint patron», une confrérie
religieuse qui assurait des prestations de prévoyance et d'enseignement notamment
religieux.


Les caractéristiques du corporatisme sont :
-dépendance du pouvoir politique de la cité ou du roi
- communauté et solidarité ;
- formation et qualification ;
- pouvoir hiérarchique (les ouvriers sont exclus de la corporation dont ils dépendent
obligatoirement)
- monopole, protectionnisme économique, et népotisme (transmission du pouvoir par le
lien familial) ;

2) Le libéralisme du nouveau régime (napoléonien).

Sur la base des théories de Rousseau (la bonté naturelle de la vie) et de Voltaire (le
bonheur assuré par la liberté) les corporations ont été dissoutes par la loi Le Chapelier
de 1791, chacun devenant libre de travailler comme il l'entend, avec interdiction de
constituer des associations d'intérêts qui viendraient limiter la liberté individuelle des
ouvriers... et des patrons ; cette interdiction a duré pendant un siècle.

Sur ces bases, le travail devient une marchandise gérée par contrat de "louage"
comme un autre outil de production.
Le développement de la société industrielle crée le développement de l'emploi non
qualifié et attire une main-d'oeuvre abondante provenant de l'exil de rural (où la misère
était encore plus grande !).

Petite exception aux grands principes de liberté : le livret ouvrier.


Résurgence d'une pratique du corporatisme, les états de service des ouvriers y sont
consignés par les patrons (à noter que les ouvriers non qualifiés ne savaient ni lire ni
écrire).
Et l'ouvrier ne pouvait trouver le travail s'il ne pouvait présenter son livret à son nouvel
employeur. Sans travail, il entrait dans une situation de vagabondage qui était un délit et
pouvait le conduire en prison.
Or, un décret de 1804 prévoyait que les patrons pouvaient garder les livrets ouvriers
jusqu'au remboursement des dettes contractées par ceux-ci, et qu'en cas de litige, la
parole du patron l'emportait sur la parole de l'ouvrier.
De plus, la situation économique était telle que le salaire d'un ouvrier ne lui permettait
pas d'acheter la nourriture pour sa famille : ce qui le conduisait à faire travailler sa
femme et ses enfants et à s'endetter auprès de son employeur auprès duquel il était
définitivement lié.


Prévoyance

Pendant la Révolution de 1789 les infrastructures de l'église catholique avaient été
détruites (ordres religieux) ou vendues (abbayes, hôpitaux, écoles, orphelinats, etc.).
Ces fonctions sociales ont été transférées aux communes ou départements qui n’ont
pas pris le relais et se sont surtout attaché au maintien de l'ordre public en créant "
dépôts mendicité», prisons où travaillaient (gratis) les personnes en situation irrégulière.
La fonction de régulation caritative de l'ancien régime n'a donc pas trouvé de relais et la
misère s'est accélérée.

Le système du travail du nouveau régime se caractérise donc par :
- libéralisme : aucune intervention de l'État dans le droit du travail
- individualisme : aucune possibilité d'associations ;
- dérégulation du marché du travail : niveau de pouvoir d'achat inférieur au niveau de
coût de la vie ;
- pas de fonction publique de prévoyance.
- supériorité juridique du patron sur les employés.

La misère et l'injustice engendrées par ce système provoquèrent des soulèvements
violents et des révolutions à répétition :
- révolution de 1830, déclenchée par les ouvriers du livre.
- révolution de 1848, où les ouvriers adoptent le drapeau rouge symbole du sang de la
répression ;
Ainsi se forge pendant un siècle une culture révolutionnaire dont l'aboutissement est la
création de la "Commune de Paris" en 1871. Suite à la famine de la ville assiégée par
les prussiens se met en place une véritable organisation politique populaire de la ville de
Paris.
Cette révolte subite une terrible répression (20 000 morts) et les leaders du mouvement
qui en réchappent sont envoyés au bagne pendant dix ans.

3) structuration du mouvement social et syndical avec le régime républicain

En 1884, la IIIe République fait voter la loi Waldeck Rousseau qui établit le principe
d'association et de grève des syndicats ouvriers.
Paradoxalement, les associations ouvrières et les partis de gauche étaient opposés à
cette mesure qui était en discussion depuis 7 années !
En fait le rapport de forces avait changé :
- la droite républicaine avait besoin d'organiser le dialogue social pour mettre fin aux
grèves et au risque révolutionnaire ;
- les partis et syndicats ouvriers, marqués par la misère et la répression et éclairés par
les thèses marxistes d'opposition ne croyaient plus dans la possibilité de la voie des
négociations et de la réforme démocratique pour faire évoluer le système du travail.
Néanmoins, cette loi donne le coup d'envoi à la construction du mouvement syndical qui
se développera pendant tout le XXe siècle :

- 1887 : des syndicats chrétiens sont créés le notamment le SECI qui deviendra la
CFTC.

- 1891 : le pape Léon XIII publie une encyclique où il condamne dans le socialisme et
encourage la création de syndicats chrétiens : «l'homme est l'élément essentiel de la
production dont il est à la fois la cause et le but »

- 1895 :
* la CGT est créée au congrès de Limoges avec comme but statutaire la lutte des
classes et l'abolition du capitalisme ; cet objectif social ne sera révisé qu'au congrès de
1995
*Les deux piliers sont la fédération du livre et celle des cheminots.

- 1906, au cours du congrès de la CGT, la charte d’Amiens définit l'indépendance du
pouvoir syndical et du pouvoir politique.

- 1917 : révolution bolchevique russe.

- 1919 :
*loi sur les conventions collectives et la journée de huit heures.
* La CGT a 1 million et demi d'adhérents.
*Création de la CFTC

- 1920 : rupture dans le parti socialiste : le mouvement révolutionnaire (PC) se sépare
du mouvement réformiste (SFIO)

- 1922 : rupture dans la CGT : CGTU (révolutionnaire, minoritaire) et CGT (réformiste,
majoritaire).

- 1927 : deuxième semaine de congés payés

- 1930 : vote définitif de la loi sur les assurances sociales a après dix années de débats durant
lesquels la CGTU les a dénoncées et la CGT les a soutenues.

- 1936 :
*Réunification de la CGT.
*Grève générale et signature des accords de Matignon entre la CGT et le patronat :
*Loi sociale sur l'extension des conventions collectives, l'institution des délégués d'atelier, la
semaine des quarante heures, et se met semaines de congés payés.
*Création du mouvement syndical des cadres

- 1941 :
*dissolution des syndicats (y compris la CFTC) et promulgation de la charte du travail interdisant
les grèves ;
* grève des mineurs du nord du Pas-de-Calais : arrestation et exécutions de quatre-vingt huit
otages CGT (cas Guy Moquet); les militants entrent dans la résistance

- 1944 : grèves, libération de Paris, création de la CGC.

- 1945 : nationalisations et lois sociales (comité d'entreprise et sécurité sociale)

- 1946 :
*promulgation du statut général des fonctionnaires par le ministre communiste Maurice Thorez ;
*la CGT revendique 5 millions d'adhérents.

- 1949 : division de la CGT entre les staliniens (ex CGTU, devenus majoritaires) et les
réformistes (minoritaires) : création du syndicat CGT- FO

-1964 : la majorité (socialiste) de la CFTC choisit la "déconfessionnalisation" et la création de la
CFDT. 10% des effectifs restent à la CFTC

- 1968 : grève générale et signature des Accords de Grenelle reconnaissant la section syndicale
d'entreprise

- 1995 :
* grève contre le plan de retraite Juppé et victoire des syndicats (Bernard Thibault, secrétaire de
la fédération des cheminots CGT) ;
* la CGT réforme ses statuts révolutionnaires

- 1999 : loi sur les trente-cinq heures.

- 2007 : grève des cheminots et accords entre le gouvernement et la CGT les régimes spéciaux
de retraite.


C) positionnement actuel des syndicats français.
• (d’après Michèle Millot et Jean-Paul Roulleau; éditions L'harmattan).

En fonction de leurs sources idéologiques les Syndicats Français actuels peuvent être
classés en deux catégories : réformistes et révolutionnaires.

Cependant, les évolutions historiques les ont conduits à des positions relativement
différentes.

C'est ainsi que la CGT a dernièrement marqué son virage vers une attitude réformiste
en acceptant le principe d'une durée plus longue de la retraite lors de négociation
suivant la remise en cause les régimes spéciaux des fonctionnaires.
Au grand dam de syndicats comme FO et Sud pour lesquels il était hors de question de
revenir sur les acquis des luttes sociales antérieures.
Inversement, le syndicat CGT- FO, fortement influencé par sa tendance trotskiste, a
manifesté dernièrement des attitudes de refus de négocier qui sont en rupture avec sa
position réformiste initiale.





Conclusion
Les syndicats français sont profondément marqués par leurs origines idéologiques et culturelles et cela a des
conséquences à deux niveaux :
1-- pour les syndicats :
Comme pour tout organisme les réalités sociales déterminent leurs enjeux de demain et les pousse à s'adapter aux
nouvelles donnes :
*soit en jouant l'adaptation aux besoins des salariés et des entreprises et en développant une attitude partenariale de
négociations dans le conflit d'intérêts néanmoins incontournable : c'est ce qu'a bien compris la CGT au moment où se
pose la question de la représentativité des syndicats vis-à-vis du corps social tout entier.
Ce grand syndicat ne pouvait pas prendre le risque de se couper de la majorité des salariés du secteur privé , surtout en
face de la concurrence de la CFDT qui a résolument pris, depuis 1968, l'orientation d'un partenaire réaliste du jeu social,
et avec succès.
*soit jouer la radicalité, notamment basée sur de « nouvelles » pour théories de la révolution représentées par les thèses
de Trotski.
Et il y aura toujours une place dans le conflit d'intérêts économiques et sociaux pour des syndicats sachant se situer sur
le terrain idéologique de la radicalité qui est -- somme toute -- le plus facile à promouvoir.
2 -- pour les entreprises
Celles-ci doivent donc s'attendre à une double évolution du mouvement social :
*d'une part l'ouverture des grands syndicats nationaux vers une position de partenariat et de négociations dont l'État aurait
la bonne idée d'achever la structuration en créant un nouveau mode d'adhésion et de financement comme dans les autres
pays occidentaux.
*d'autre part, la radicalisation des syndicats minoritaires avec un double effet d'aiguillon du jeu social (face à une
communication et à des actions directes voire violentes les syndicats traditionnels vont adopter des comportements
beaucoup plus incisifs) et d'empêcheur de négocier en rond.

Face à ce double mouvement qui s'amplifiera par un effet de résonance les entreprises doivent renforcer le dialogue
social et apprendre à ouvrir des espaces de négociation sur les sujets de conflits émergeants.
Elles doivent elles-mêmes conduire la « révolution permanente » si elles ne veulent pas que d'autres s'en occupent...
Ceci va conduire à un renforcement des fonctions de communication et de relations humaines dans les entreprises pour
être plus près des réalités managériales et des attentes des salariés.

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